La flexibilité cognitive, faculté de s’adapter à des situations nouvelles se traduit, par la capacité à adopter plusieurs points de vue sur une situation ainsi qu’à pouvoir en changer. Cela fait de la résolution de problèmes, aujourd’hui considérée « comme une activité complexe finalisée » dans laquelle « un rôle central est accordé à la représentation mentale construite en situation dans la découverte de solution », un paradigme particulièrement pertinent pour son étude.
1. Comment définir la flexibilité cognitive ?
Si le caractère flexible du fonctionnement cognitif est reconnu comme étant « probablement une des spécificités de la cognition humaine », un consensus reste à trouver quant à la définition de la flexibilité cognitive. De fait, dans une étude sur le développement des fonctions exécutives, on insiste sur les difficultés liées à sa définition et sur l’ambiguïté du terme même de flexibilité, qui peut traduire une fonction simple comme un processus complexe. Une autre contribution, selon laquelle l’étude de la flexibilité cognitive dans les situations de résolution de problème permet d’en proposer une conception unifiée.
La flexibilité cognitive désigne la capacité de passer d’une tâche cognitive à une autre, ou bien d’un comportement à un autre en fonction des exigences. C’est aussi la capacité de réfléchir à plusieurs possibilités à un moment donné, pour résoudre les problèmes. Il est clair qu’il s’agit d’un défi de ce début de XXIème siècle. En effet, la simultanéité du traitement des informations ou de rapidité d’exécution des tâches est devenue une qualité au travail. La génération des Milléniales a sans nul doute une capacité importante de flexibilité cognitive étant entrainés dès leur enfance. En même temps, cette qualité peut également se développer tout au long de sa vie, dans la limite de ses capacités intellectuelles innées.
2. La flexibilité cognitive : Une simple fonction exécutive
En neuropsychologie, la flexibilité cognitive est décrite comme l’une des fonctions exécutives participant du contrôle exécutif qui, lui-même, facilite l’adaptation dans les situations nouvelles, celles pour lesquelles les routines d’exécution n’existent pas ou ne sont pas appropriées. Elle serait donc l’un des processus qui permet à chaque individu de réguler intentionnellement sa pensée et ses actions en fonction des buts qu’il cherche à atteindre.
Certains travaux ont contribué à différencier ces processus exécutifs qui en distinguent trois : les processus de mise à jour d’abord, grâce auxquels le contenu de la mémoire de travail se modifie en fonction de nouvelles entrées, les processus de flexibilité, ensuite, qui concernent le déplacement volontaire de l’attention d’une catégorie de stimuli à une autre, ou d’un processus cognitif à l’autre, les processus d’inhibition, enfin, qui permettent d’éviter que des informations non pertinentes viennent perturber l’activité en cours.
Ces trois processus exécutifs s’appliquent, de manière transversale, dans toutes les situations réclamant du contrôle, à des processus cognitifs qui sont, à l’inverse, spécifiques à la tâche à réaliser. Leur rôle régulateur de la cognition tient donc à leur fonction de contrôle de ces processus cognitifs, eux-mêmes plus ou moins automatisés. Dans ce cadre, la flexibilité cognitive est une simple fonction exécutive, au même titre que l’inhibition et la mémoire de travail ; elle représente alors la capacité à basculer efficacement entre plusieurs tâches, ce que l’on nomme également switching ou shifting.
Une autre expérience différencie pourtant deux aspects différents de la flexibilité, qu’ils nomment flexibilité réactive et flexibilité spontanée, cette distinction semblant confirmée par des études menées en imagerie cérébrale La flexibilité réactive se manifeste dans un contexte changeant, les contraintes de la situation exigeant un changement de réponse pour une conduite adéquate. La flexibilité spontanée, en revanche, s’exprime par des réponses variées dans un environnement stable, ne contraignant pas nécessairement au changement.
3. Le développement de la flexibilité cognitive :
Il est désormais bien établi que la flexibilité cognitive se développe fortement durant la période préscolaire (3-6 ans). La plupart des propositions théoriques actuelles assimilent le manque de flexibilité à de la persévération sur des représentations qui ne sont plus pertinentes et interprètent les gains de flexibilité comme le reflet d’une capacité croissante à se désengager de ces représentations. Dans ce document, nous défendons une conception de la flexibilité cognitive mettant l’accent sur deux composantes principales : la gestion des buts, des tâches et l’implémentation de la bascule entre plusieurs tâches.
Cette conception suggère que différents processus, associés à ces deux composants, sous-tendent le développement de la flexibilité. Les résultats de sept expériences, s’appuyant sur différents indices (exactitude, temps de réponse, temps de fixation), montrent qu’au niveau de l’implémentation de la bascule, le manque de flexibilité des enfants préscolaires reflète davantage une difficulté à activer des représentations précédemment ignorés qu’un échec à se désengager de représentations anciennement pertinentes.
Les résultats soulignent également le rôle essentiel de la gestion des buts des tâches et en particulier, du maintien du but de la tâche pertinente en mémoire de travail et de la mise en place des buts sur la base d’indices de tâche ou de feedbacks sur les réponses. Dans la dernière partie de ce document, nous discutons en quoi ces résultats et la conception de la flexibilité en deux composantes principales permettent de dépasser les limites des propositions théoriques existantes.